VENEZUELA 2005

Juin : 16 26

Juillet : 9

Voir le travail effectué par les enfants dans ce pays

 

Vendredi 16 Juin

 

Ça y est, on a retrouvé le soleil. 39°, de la musique partout (de la salsa et du merengue crachés par des hauts parleurs poussés à fond dans les bus, les épiceries, les bars, sur les trottoirs …) des couleurs, des cocotiers, des couchers de soleil rouge vifs, des plantations de cacao, des odeurs d’humus et d’ananas et des jolies filles en bikini, voilà les Caraïbes.

A 4 heures de route à l’est de Caracas, sur la côte, Caruao, un petit village paradisiaque perdu entre la mer et la jungle. C’est là que nous allons organiser le projet avec les enfants de l’école. Caruao a une saveur africaine toute particulière (la côte Nord du pays est le centre de la culture black descendant des anciens esclaves). Une des particularités de la région et du Venezuela en général c’est ce mélange de populations hispano-indio-africaine.

Le village est un petit théâtre de maisons colorées surplombant la plage. Une église coloniale en haut du village, c’est notre maison (notre contact ici pour l’organisation du projet est un prêtre (Padre Justo) alors on loge au presbytère, c’est spartiate mais tranquille).

La végétation est luxuriante. Des pélicans, des ibis et des aigrettes survolent la plage en permanence, les enfants jouent avec des tortues marines. Un petit paradis naturel…

Ici chacun a son petit rythme, les pêcheurs partent en mer, ou alors quand il y a beaucoup d’aigrettes au dessus de la plage (signe de poisson) tout le village aide à tirer des filets, des vieux lisent le journal à l’ombre, un homme revient avec des bananes plantains dans une main et son coupe-coupe dans l’autre, des gens discutent du matin au soir sur la place le plus souvent une bière à la main, des gosses grimpent au manguier, le vendeur de fruits et légumes passe de village en village avec son camion et fait des annonces au micro pour vendre ses belles tomates, ses beaux ananas et ses belles goyaves (au début on croyait qu’il faisait de la propagande politique mais en fait non). Tout le monde se connaît et se serre les coudes.

Nous multiplions les rencontres. Le village de 900 âmes est plein de figures mythiques : la senora Cypriana qui nous gave de spécialités locales, Julian un vieux papy bedonnant qui nous raconte l’histoire du village, l’ancien sous-officier de marine qui nous parle de Marseille, Manuel ancien éleveur de caïmans, Petra et Maïté les deux sœurs qui ont les plus mini-micro shorts du village, Begonia qui veut qu’on lui parle de l’Himalaya, Fidelina l’épicière qui sourit tout le temps, Carlos le mécano qui bosse sur la même voiture depuis notre arrivée (l’alternateur), Josepha la cuisinière qui attend tranquillement le client à la porte, Herné qui nous parle de la patronne du village Santa Rosa, William qui va peut-être nous emmener voir les plantations de cacao, Winston qui va peut-être nous emmener aux cascades, Miguel qui vient des Andes et qui vient d’être papa, un allemand qui joue toujours aux dominos, les vieux qui chantent le week-end, un vieux cubain qui nous fait des grands coucous avec sa canne, un médecin toujours avec une blouse blanche et un bloc-notes sous le bras,….

En allant à La Sabana (un village un peu plus grand), on est pris en stop par la police et évidement comme on toujours beaucoup de chance et qu’au Venezuela un flic ne dort jamais, on a droit à une démo : ils procèdent à une arrestation en règle sur le chemin. Pistolets dégainés et suspect interpellé (on ne sait pas trop pourquoi). Un policier inspecte les lieux discrètement et redémarre, le klaxon se bloque et s’il restait des bandits dans les bosquets, ils sont sûrement déjà loin…

 

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Dimanche 26 Juin

 

Jeudi, le village est en effervescence, et se prépare à fêter la San Juan. Il a fallut brûler le bois flottant que la mer avait rejeté sur la plage, nettoyer les rues, sortir les tambours. Les épiceries font le plein de bières, chacun prépare sa spécialité à vendre le jour J (purée de mangue, cocktails d’aguardiente coco, …).

Le 23 c’est le lancement officiel. Ça commence de nuit avec les tambours et les conques qui résonnent dans tout le pueblo et qui annoncent 3 jours de fête sous le signe de la musique, de la danse, des chants et de l’aguardiente (l’eau de feu).

Le Tambor : un cercle se forme, au centre un couple de danseurs qui ondulent des abdos et des fesses, c’est chaud. Les enfants forment leurs cercles et sont tout aussi enfiévrés que les adultes. C’est la folie. Il commence à pleuvoir mais tout le monde bouge vers le fleuve au bout de la plage pour le grand feu de la Saint Jean. Le feu ne prend pas, puis finalement si ! Une statue de San Juan est amenée en barque jusqu'à la plage et on se passe l’icône et danse en la tenant au-dessus de la tête. Et pour se porter chance, tout le monde à l’eau pour un bain de minuit mémorable ! On se réchauffe en dansant autour du feu.

 

 

Le lendemain, après la messe, les tambours viennent chercher Juan à l’église pour l’emmener danser. Il est midi, l’alcool coule déjà à flot, ça se bat pour danser, San Juan perd un bras dans la bataille.

Le village est méconnaissable, des dizaines de voitures bloquent les rues, la plage est pleine de monde. La fête bouge de place en place dans le village. Les grands-mères dansent aussi, les épiciers font leur journée. Les tambours sont fatigués mais la foule ne veut pas s’arrêter de danser. Et c’est déjà la nuit. Bien sûr, nous sommes encouragés à faire preuve de nos talents de danseurs et de souffleurs de conque.

Le troisième jour, c’est un peu plus calme. Une pinata pleine de bonbons est accrochée à un arbre et les enfants se relaient pour tenter de la casser les yeux bandés avec un bâton pour libérer le trésor, l’heureux gagnant provoque une émeute et n’a pas le temps de retirer son bandeau qu’il ne reste déjà plus que des confettis !

 

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Vendredi 9 Juillet

Après la San Juan, le village reprend son rythme auquel nous adhérons de plus en plus. Nous avons maintenant l’habitude de nous arrêter sur les pas de maison pour discuter avec les uns et les autres : des enfants avec les professeurs qui louent notre endurance, de cuisine avec Fidélina l’épicière, de politique avec Ismelda la tenancière- candidate.

Tous les soirs pour se rafraîchir, direction le « rio », embouchure de rivière où les enfants viennent chahuter, construire un toboggan, se laver, nous demander de les attraper, plonger, se battre, nous demander de les attraper, reconstruire le toboggan qui s’écroule pour la 100 ème fois depuis 4 jours, jouer avec les têtards, nous demander de les attraper…

Nous nous aventurons en dehors du village pour visiter une plantation de cacao, entrapercevoir une ferme spécialisée dans le fromage de chèvre (que nous ne goûtons malheureusement pas).

Et surtout pour découvrir le « Poso del cura », une succession de cascades désertes au milieu de la jungle.

Il est aussi possible de tremper ses pieds dans une source chaude à même de faire bouillir des oeufs. Après avoir trempé un orteil nous confirmons et préférons aller nous attarder dans les bassins en bas des cascades et plonger depuis les rochers, pendant qu’Alfonso, 11 ans, notre guide, s’amuse à glisser sur le toboggan naturel de 6m de haut.

Nous poussons aussi nos explorations jusqu’à Caracas pour une journée : pollution, ordures, petite angoisse après les noirs portraits tracés par nos amis quant à la réputation de la ville (pour les imiter, nous transformons nous aussi nos chaussettes en porte-monnaie). Caracas n’est pas à franchement parler une belle ville et c’est la joie au cœur que nous retrouvons la tranquillité du village.

 

Enfin tranquille… Nous avons encore droit à une superbe démonstration policière le samedi soir. Calmement installés sur un banc et en pleine dégustation de la spécialité locale qu’on nomme « perro caliente » (plus vulgairement un hot dog), nous voyions un van de police s’arrêter brusquement devant nous. Un homme cagoulé et armé en jaillit, court, saute un muret et disparaît sur la plage pendant qu’un de ses collègues entreprend de fouiller des suspects (jeunes à casquette et chaîne en or, comme quoi, le petit manuel du suspect doit être le même partout). Le cagoulé revient avec son suspect qui entend ne pas se laisser faire, ses copains s’en mêlent en faisant obstacle à la voiture de police, en tirant leur copain donc un troisième flic sort avec un gros fusil et tire en l’air, le prisonnier part en courant et comme les habitants du village ont des mauvais souvenirs de balles perdues, tout le monde en fait de même. Nous ne sommes pas les derniers. Finalement les flics démarrent en trombe laissant derrière prisonnier et… une paire de menottes au poignet de ce dernier.

Rions ensemble, une curiosité linguistique : menottes en espagnol se dit « esposas » (épouses).

Et c’est le départ : dernière journée à entendre les enfants nous interpeller en criant nos noms eh oui nous sommes des stars, à se régaler de poisson frits et d’ananas fraîchement cueillit sur fond de reggaeton.

Nous faisons escale à Macuto sur la route de l’aéroport. Ville durement touchée par les coulées de boue de 1999 qui ont détruit une grande partie des villes de la côte Est. Des immeubles à moitié détruits, des carcasses de voitures, des friches où demeurent quelques maisons abandonnées de leurs riches propriétaires et squattés par les populations demeurées sans domicile depuis la tragédie.

Nous y suivons le Padre Justo, qui travaille à un programme d’aide aux filles-mères, dans sa visite à une de ses protégées, une jeune fille de 15 ans qui vit au premier étage d’un immeuble dont manquent plusieurs murs avec ses deux enfants (2 et 1 ans) qui traînent nus faute d’argent pour leur acheter des vêtements.

Un projet qui s’ajoute à la longue liste des initiatives locales dont nous avons étés témoins et auquel nous avons à cœur d’apporter notre aide.

 

Et puis finalement ce n’est plus le départ. Finalement, nous restons et ce n’est pas dû à notre volonté sinon à la compagnie aérienne qui a annulé tous nos billets et bien sûr le vol est plein.

Nous pensions bien être les derniers à supplier l’hôtesse de nous trouver des places pour regagner l’Europe, comme quoi, comme le dit le proverbe local, il ne faut jamais dire « Compadre, je ne boirai pas de ton aguardiente ».

 

Rions encore : biens arrivés à Madrid, nous vous conseillons la lecture de la formidable page consacrée aux "conseils voyageurs " quant aux dangers vénézuéliens du site du Ministère des Affaires Etrangères.

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Et c'est le retour!

 

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