LE LIEVRE ET LA MOUFETTE

(Conte des indiens guajiro, tribu qui vivait au nord-ouest du pays)

 

Les vieux racontent que la moufette était la meilleure guérisseuse de tous les animaux aux vieux temps où ceux-ci vivaient comme les hommes.

Un jour, la moufette part pour la ville de Rio Hacha pour soigner quelqu’un qui avait un mauvais esprit installé dans les poumons et ressentait de grandes douleurs. Elle part donc et marche d’Est en Ouest et rencontre bien vite le lièvre qui voyageait en sens inverse. « Ou vas-tu si vite ? » lui demande celui-ci. La moufette raconte qu’elle se rend à Rio Hacha et pose la même question au lièvre. Celui-ci répond : « Je vais où le vent me porte en direction du soleil naissant. Au fait, aurais-tu un petit peu de tabac pour me tenir compagnie. » La moufette le regarde et le distingue mal avec ses petits yeux aveugles puis cherche un cigare qu’elle tend au lièvre. Les deux se séparent et continuent leur route.

Le lièvre est tout content et fume son cigare tout en marchant. Mais il se perd et se retrouve bientôt de nouveau face à la moufette. Décidant de profiter de la cécité de la guérisseuse, il change de voix pour parler : « Bonjour ! D’où venez-vous et que se raconte t’il de beau sur la route ? ». La moufette répond : « Je me rend à Rio Hacha et ai rencontré sur la route un lièvre qui voyageait dans la même direction que vous. ». Le lièvre fait son intéressé puis demande : « Dites-moi, n’auriez-vous pas un peu de tabac à me donner ? La route est bien longue. ». La moufette tend au lièvre qu’elle ne reconnaît pas un cigare avant de continuer son chemin.

Le lièvre ne veut pas en rester là et encore deux fois recommence son manège.

Cependant, après la quatrième fois, la moufette inspecte sa besace et se rend compte qu’il ne lui reste plus de tabac ! Plus rien pour faire des massages et aider à la guérison à son malade. Elle réfléchit et se rappelle les rencontres successives qu’elle a faite et comprend la ruse du lièvre !

La moufette réfléchit puis s’assied pour confectionner un remède. Elle mélange du piment rouge, de la résine, un peu de tabac qu’il restait et finit en ajoutant sa propre urine. Elle mélange et forme deux cigares avec l’étrange mélange. Elle reprend ensuite sa route et bien sûr ne tarde pas à rencontrer une nouvelle fois le lièvre jouant un nouveau personnage en manque de tabac. La moufette continue ensuite gaillardement sa route.

Le lièvre resté seul avec les deux cigares, s’assoit pour les déguster. Il en allume un et rapidement commence à ressentir des nausées. Le lièvre continue pourtant à fumer, bien décidé à apprécier le tabac. Mais bientôt d’étranges symptômes s’ajoutent à sa nausée : son nez le démange, il éternue, a un malaise. Il regarde le cigare et comprend qu’il a été joué ! La moufette est déjà loin.

C’est pour cela, dit-on dans la région de Guajira, que tous les lièvres ont en permanence le nez qui remue et de fréquents éternuements.

 

 

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